« Éros a secoué mes phrènes, comme le vent qui s’est abattu sur les chênes dans la montagne »
Sapphô de Mytilène (traduction inédite de Claude Calame

Il y a des montagnes comme des sœurs minérales, orogénies des temps anciens qui se rencontrent quand l’art s’en mêle, quand un lieu les rêve, quand les hommes voyagent et vivent librement, quand les frontières s’effacent pour laisser place à l’imaginaire et à la sensibilité qui bouleversent nos perceptions planifiées et provoquent des rencontres inattendues.
Fadma Kaddouri, février 2025

Pour braver le proverbe « Il n’y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas », La Non-Maison propose à plusieurs artistes d’exposer des œuvres telle une variation sur le thème de la Montagne Sainte-Victoire et au-delà dans le cadre de l’année Cézanne 2025. Cette exposition sera évolutive, d’autres artistes rajouteront des œuvres au fil des mois.
Michèle Cohen 

Michel Audureau
Ivan  Boccara
Silvie  Brière
Tomas Colaco
Mylène Duc
Ulrich Hagai

Fadima Kaddourri
Serge Kantorowicz
Harel Luz
Brigitte Manoukian
Catherine Peillon
Bernard Plossu

Sœurs minérales

Exposition du 29 mars au 28 septembre 2025 
à la NON-MAISON
Vernissage le 29 mars à 18h

Galerie la Non Maison
22 rue Pavillon 13100 Aix-en-Provence

Ta présence est plus insistante que la présence,
imminente
divine inspiratrice dans ton âpreté brute,
toi animal sacré et autotrophe,
te nourrissant de fumées
souvenirs d’aromates
de pierres vivantes et d’encens,
quand descend la nuit ancienne et identique,
l’extase d’Ingrid au matin nouveau,
tu nous envoûtes
nous révèles
nous métamorphoses
Seule, sacrée et solennelle
indifférente
lointaine
tes arêtes hérissées
par la colère de la terre
me déchiquètent
Battue par les vents,
mouillée des pluies de Zeus
arrondie par le feu,
auréolée de nuages
des voiles brumeux d’Héra,
tes plis sont les froissures du désir
tes cavités, quelques antres pour nymphes
égarées dans l’aujourd’hui

Un mot de Laurence Ermacova

Je viens de lire ton poème et la présentation de ta nouvelle exposition. Le poème est magnifique, envoutant. La montagne – je la nomme montagne en relation avec les photos et aussi pour la puissance qui émane de ton poème mais cela n’est peut-être q’un bout de roche, qu’un caillou et ce n’est pas si important que ça après tout – elle retrouve son aspect grandiose, mythique, sa force première. Elle est de nouveau mystérieuse, faiseuse de récits, enchanteresse et au delà même de la beauté et de la puissance de sa description elle redevient maitresse de sa vie et de son sort. Elle est capable d’insuffler des mots à ces autres entités vivantes que nous sommes, comme elle, mais différentes, incapables de faire pousser un arbre sur nos flancs mais capable de dire les arbres sur les flancs des autres. Capables, de regarder dans les plis creusés par l’eau dans les roches et d’y voir des nymphes.

Et puis évidemment les nymphes, les nymphes d’aujourd’hui… c’est le thème de Siegfriedstrasse aussi. Elles me sont chères et tu les fais apparaître avec une économie de mots et une efficacité poétique qui me sidère.

Et pour les photos je me suis prise à imaginer un orque immense et terrestre qui se repose et rêve, des corps de femmes enlacés, la vapeur du désir, un goutte d’encre qui se noie dans la mer et se fait écrire par une seiche, un peintre (chinois?) ayant perdu la vue et peignant des paysages à la brume de ses souvenirs qui remontent des siècles de paysages peints à l’encre et à l’eau.